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Peut-on vraiment gérer son temps ?

Si l’on en croit par le nombre d’ouvrages ou de formations proposées pour « gérer son temps », le sujet passionne. Disons sans détour que la juxtaposition des mots « gérer » et « temps » ne nous parait pas aller de soi. On comprend bien la gestion de ressources matérielles, d’argent… mais que veut dire « gérer du temps » ? Cette expression est à rapprocher de « gérer ses émotions » voire de « gérer sa vie », formules se voulant rassurantes et sûrement vendeuses : est-ce vraiment cela que l’on souhaite quand il s’agit de temps, d’émotions ou de vie : les gérer ? Comme à notre habitude, nous nous sommes inspirés de la nature pour explorer cette question de « gérer son temps ».

Jacques Tassin nous guide au pied d’un arbre dans « A quoi pensent les plantes ? », ouvrage dans lequel il aborde entre autres le sujet de la temporalité du végétal. Parcourons trois dimensions du temps inspirées de l’observation d’un arbre, que nous allons mettre en relation avec la vie professionnelle du dirigeant d’entreprise et la gestion de son entreprise : le temps linéaire, le temps cyclique et l’aléas temporel.

Gérer son temps dans la  continuité

La dimension la plus intuitive du temps qui passe est sans doute celle qui considère des instants se succédant les uns aux autres : le temps linéaire. Si l’on observe un arbre, rien ne semble vraiment changer, car sa temporalité est bien différente de la nôtre. Comme celle de l’entreprise, qui sauf accident nous survivra. Le dirigeant doit faire face à ce large éventail de temporalités : il agit et décide bien sûr au quotidien et même heure après heure voire à chaque minute dans certains métiers. Le développement des technologies de l’information a rendu ce phénomène implacable. L’expression « temps réel » caractériserait-elle notre époque, repoussant aux marges de la réalité ceux (les sages ?) qui s’affranchissent de la dictature de l’instantanéité pour retrouver du sens et de la profondeur ? N’entend-on pas dire que « le temps passe de plus en plus vite » ? Bien sûr ce n’est pas le cas, seule notre perception du temps évolue, et si l’on y prend garde, nous submerge. Il s’agit bien pour le coup de gérer son portefeuille de priorités afin de ne rien rater d’essentiel. Puissance de travail, capacité à passer à l’action, résilience aux situations potentiellement stressantes sont alors des qualités nécessaires pour tenir la barre. Mais le temps long, les enjeux de long terme, nécessitent aussi une attention de la part du dirigeant. Il s’agit de dessiner sa vision, d’établir et déployer une stratégie pertinente dans un environnement changeant et incertain. L’arbre aussi « tient dans le temps long », déploie sa couronne pour optimiser l’accès à la lumière, et ses racines en quête de ressources, inlassablement. On dit parfois quand on s’ennuie qu’on « trouve le temps long ». C’est au premier degré que cette expression s’applique au dirigeant : c’est aussi une de ses missions que de trouver le chemin vers le temps long pour son entreprise. Pour vous, quel est l’horizon temporel au plus fort enjeu ? Et quelle part de votre temps de travail y consacrez-vous ?

Gérer son temps de façon cyclique

Autant l’esthétique de l’arbre semble immuable dans l’instant, autant le moment choisi pour lui rendre visite conditionne le spectacle. L’explosion florale du printemps ou les couleurs chaudes du feuillage en automne nous rappellent une évidence : l’arbre vit au rythme des saisons. Ainsi, chaque année, feuillaison, floraison, fructification et dormance se succèdent. La croissance est plus ou moins continue mais suit plutôt une spirale saisonnière qu’un axe du temps. Les plantes vivent aussi au rythme quotidien des journées et des nuits, profitant à plein de la lumière le jour. Plusieurs cycles interconnectés, donc… Qu’en est-il du pilotage de l’entreprise ? Selon l’organisation en place et le mode de gestion adopté, la vie du dirigeant est aussi potentiellement rythmée par des événements cycliques :

  • les points quotidiens
  • les réunions hebdomadaires
  • les revues mensuelles
  • les situations trimestrielles
  • le bilan annuel et l’assemblée générale…

Structurer une organisation permet de maîtriser l’action aux différentes échéances et libère du temps pour la réflexion à long terme. En général très informelle à l’origine, l’organisation de l’entreprise évolue et tend à se renforcer lorsqu’elle croit. Les recettes évoluent mais les questions restent les mêmes :

  • comment travailler en équipe alors qu’on n’a qu’une vue partielle de l’ensemble ?
  • comment communiquer la bonne information à la bonne cible au bon moment ?
  • comment allouer les ressources et en vérifier la rentabilité ?
  • comment limiter la lourdeur sans toutefois prendre trop de risques ?
  • comment faire confiance tout en gardant le contrôle ?
  • comment maîtriser l’ensemble sans tuer l’initiative ?

L’organisation idéale dans un contexte donné existe-t-elle ? Où faut-il au contraire intégrer les spécificités du métier, de l’équipe, de son histoire… pour trouver la meilleure solution aux questions ci-dessus ? Quelles que soient les réponses choisies, il y a fort à parier que les décisions prises engendreront la mise en place (ou pas !) de rituels communs planifiés dans le temps. Et dès lors la vie de l’entreprise battra au rythme de ces moments faisant partie de la culture commune.

Gérer son temps face aux aléas

S’en tenir au temps long de la croissance continue de l’arbre et au cycle des saisons laisserait entrevoir une grande maîtrise possible de la situation. Mais ce serait oublier la dépendance de l’arbre aux événements prenant place dans le temps chaotique. Un orage violent et c’est une branche qui craque, la foudre s’abat et c’est l’incendie qui menace, un insecte ravageur est introduit et la survie est en jeu ! De même pour l’entreprise, gérer la continuité et les cycles ne suffit pas. Parfois c’est à l’imprévu qu’il faut faire face. Pour votre entreprise, vous êtes-vous demandé quelles formes pourraient prendre l’orage, la foudre, l’insecte ? Cet exercice d’analyse des risques est en général préconisé comme étape lors d’une démarche de réflexion stratégique. Décider d’une stratégie demande à la fois une bonne appréhension de la réalité environnante, et une bonne part d’intuition gagnante pour se différencier des usages standards.

Conclusion : Gérer son temps ?

Le bilan d’une entreprise décrit son patrimoine, ou en tout cas sa traduction financière. Certaines composantes immatérielles de ce patrimoine sont difficiles à évaluer, même si des règles émergent à ce sujet. Mais un élément est systématiquement absent : le temps ! Hors c’est un élément essentiel dans la vie du dirigeant. Ce dernier est amené à  gérer un portefeuille de priorités à différentes échéances, plutôt qu’à « gérer son temps ». Le temps, celui investi au travail, l’équilibre « vie professionnelle / vie privée », sont des sujets qui émergent souvent en cours d’accompagnement. Quoi de plus précieux finalement ? Et comme nous n’oublions pas que nos clients sont des personnes avant d’être des entreprises, nous citerons Robert Sabatier pour conclure : « Le temps, c’est de l’argent. Sur les tempes. »

Le dirigeant d’entreprise peut donc gérer son temps en adoptant différentes approches complémentaires. Chacune apporte un autre regard et ouvre de nouvelles pistes. Le rapport au temps et comment bien gérer son temps fait souvent l’objet d’une demande de business coaching de la part de nos clients. Si tel est votre cas et si vous percevez le temps comme un élément qui semble vous échapper ou dont vous semblez manquer, n’hésitez pas à prendre contact avec nous !